Interdiction de la grève pour les policiers - Arrêt du 21 avril 2015 de la Cour européenne des droit
Dans un arrêt du 21 avril 2015 (affaire Junta Rectora Del Ertzainen Nazional Elkartasuna (Er.N.E.) C. Espagne), la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé que l’interdiction de tout droit de grève au personnel de police n’est pas contraire au principe de la liberté d’association prévu par l’article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
L’affaire concernait le refus des autorités espagnoles, suite à l’échec de négociations menées avec un syndicat (simplement appelé Junta Rectora Del Ertzainen Nazional Elkartasuna) représentant des fonctionnaires de police, d’autoriser ce dernier à organiser une grève. Ce refus d’autorisation était fondé sur la loi espagnole, qui prévoit que « les membres des Forces et Corps de Sécurité ne pourront en aucun cas exercer le droit de grève, ni des actions substitutives de ce droit ou concertées avec le but de perturber le fonctionnement normal des services ».
Après avoir introduit des procédures de recours auprès des juridictions espagnoles, sans succès, le syndicat s’est adressé à la Cour européenne des droits de l’homme pour se plaindre d’une violation de sa liberté syndicale (qui fait partie de la liberté d’association protégée par l’article 11 de la CESDH) et de la différence de traitement subie au regard d’autres catégories de personnel.
La Cour européenne des droits de l’homme, confirmant en tous points sa jurisprudence antérieure en matière de liberté syndicale, a rejeté ce recours.
La Cour n’a bien sûr pas nié l’existence d’une ingérence de l’Etat dans l’exercice de la liberté syndicale. Elle a toutefois relevé que cette ingérence poursuivait un but légitime, à savoir « la défense de l’ordre, eu égard aux fonctions spécifiques attribuées à ce corps de police et aux conséquences éventuelles en cas d’interruption de ses activités ». Elle a aussi constaté que cette ingérence était limitée à ce qui est nécessaire dans une société démocratique, en visant de manière précise une catégorie de fonctionnaires garante du maintien de la sécurité publique et ayant la responsabilité « d’intervenir à tout moment et en tout lieu en défense de la Loi, que ce soit pendant les heures de travail ou pas ».
La Cour conclut donc à l’absence « d’une ingérence injustifiée dans le droit du syndicat requérant à la liberté d’association ».
Sur le plan de l’égalité de traitement, la Cour a noté que la nécessité d’un service ininterrompu et le mandat armé qui caractérise ces agents de l’autorité les distingue « d’autres fonctionnaires tels que les magistrats ou les médecins et justifie la limitation de leur liberté syndicale ». Pour la Cour, l’article 11 de la CESDH n’est donc pas non plus violé s’il est combiné avec le principe d’égalité contenu à l’article 14 de la CESDH.