L’absence d’un droit à un double degré de juridiction en matière de déchéance de nationalité

Dans un arrêt n° 122/2015, la Cour constitutionnelle a répondu négativement à la question préjudicielle qui lui était posée par la Cour d’appel de Bruxelles quant à la constitutionnalité des articles 23 du Code de la nationalité belge et 604 du Code judiciaire.
Ces articles prévoient deux procédures distinctes de déchéance de la nationalité. La première procédure est menée par le parquet devant le tribunal correctionnel saisi de poursuites pénales, et la seconde est menée par le parquet directement devant la Cour d'appel, indépendamment de toute poursuite pénale.
La déchéance de nationalité ne concerne que les belges "qui ne tiennent pas leur nationalité d’un auteur ou adoptant belge au jour de leur naissance" et les belges qui "ne se sont pas vu attribuer leur nationalité en vertu de l’article 11" du code de la nationalité.
La loi prévoit que ces citoyens peuvent être déchus de leur nationalité, soit par le tribunal correctionnel, soit par la cour d'appel, s'ils l'ont acquise à la faveur d'une fraude ou s'ils ont manqué "gravement à leurs devoirs de citoyens belges".
La procédure de déchéance de nationalité peut donc notamment viser certaines personnes ayant participé à une organisation terroriste.
La question posée à la Cour constitutionnelle concernait essentiellement la procédure de déchéance que le parquet peut mener directement par citation devant la Cour d'appel, indépendamment de toute poursuite pénales. Une personne citée en déchéance de nationalité devant la Cour d’appel de Bruxelles estimait cette procédure contraire au principe du double degré de juridiction en matière pénale, combiné aux principes d'égalité et de non-discrimination.
Contrairement à une personne dont la déchéance de nationalité est poursuivie devant le tribunal correctionnel, une personne citée devant la Cour d’appel ne peut en effet introduire un appel de la décision rendue à son égard.
A l'issue de son arrêt, la Cour constitutionnelle décide que les articles 604 du Code judiciaire et 23 du Code de la nationalité belge ne violent pas les articles 10 et 11 de la Constitution. Son raisonnement est essentiellement fondé sur le fait que la déchéance de nationalité, qui est indépendante de toute poursuite répressive, n'est pas une peine mais une mesure de nature civile et que, en tant que telle, elle n'ouvre pas le droit à un double degré de juridiction selon l’article 2.1 du Protocole n° 7 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.